Du coup, je suis souvent fort mal comprise. Surtout (ô ironie) dans le domaine spirituel, parce que soyons honnêtes cinq minutes, la plupart du temps, la sphère païenne, c'est du positivisme qui fait cuicui dans les prairies. Je trouve ça chouette, hein. Mais tellement ... pas moi.
Tenez, récemment, je m'en suis pris plein la tête de la part de quelqu'un qui avait décrété que pratiquer en lune noire et faire de la nécromancie c'était mal, que c'était la voie de la perdition, qu'Hécate (que je ne vénère pas, en plus, ô ironie bis) n'était rien qu'une méchante qui grignote les orteils des petits n'enfants, et que, partie comme j'étais partie, si je ne revenais pas vite dans la "Lumière" (qui était, pour cette personne, la Wicca), j'allais morfler sévère. J'ai tenté de lui faire comprendre que je ne voyais pas le monde de cette façon, que la nécromancie ne menait pas nécessairement aux travers qu'on lui impute systématiquement, que la lune noire n'est pas un moment maudit et qu'Hécate doit sûrement avoir elle aussi un certain sens de l'humour, mais rien n'y a fait. J'ai été la méchante qui l'avait agressé. Le pire, c'est que je sais bien que cette personne ne m'a pas sauté à la gorge avec méchanceté, mais parce qu'elle était persuadée de détenir la vérité. Comme ceux et celles qui me disent qu'en aimant plus les gens et en râlant moins, je serais plus-mieux-bien.
Oui, mais plus-mieux-bien pour qui ? Pour moi ? Non, c'est ma nature, je suis comme ma mère, qui est comme ma grand-mère avant elle, je me méfie des gens parce qu'ils m'en ont mis plein la gueule et j'ai besoin de râler (d'ailleurs des études récentes ont prouvé que c'était bon pour la santé) (bien cordialement, S). Alors, si ce n'est pas pour moi, pour qui ?
Et bien pour eux, tout simplement. Ne soyez pas dupes, amis in-casables, si on veut vous faire changer, ce n'est pas (toujours) pour votre bien. C'est surtout parce que vous conviendrez mieux à l'image que l'on se fait de vous.
Et ça, quand on y réfléchit, c'est moche.
Un jour on m'a dit, à son propos : "Mais ! Elle est méchante !"
J'en suis restée comme deux ronds de tartiflette au poivre.
Méchante, ma Chacha ? Ma boîte à pouics, qui hurle à la mort quand elle se réveille et qu'elle voit sa gamelle vide ? Ma boule de poils, qui ronfle écrasée sur le sol comme un postiche oublié ? Ma grosse ventrue, qui pleure de joie dès qu'elle renifle l'odeur des cerises ? Méchante, ma Charlotte qui répond à son nom, tient de vraies conversations avec moi quand je suis seule à la maison et refuse catégoriquement de sortir de sa cage, alors même qu'elle m'a fait une comédie pendable pour ne plus avoir de porte ?
Méchante, tout ça parce qu'elle n'aime pas les câlins ?
Alors que moi je l'aime tant. Même mon copain l'adore, au fond, même s'il l'appelle "la Moche" et qu'il la craint un peu parce qu'elle a voulu vérifier si par hasard son doigt n'était pas comestible (il sentait la sauce au pesto, aussi). Parce que certes, elle n'est pas câline, mais elle est tellement plus.
Si un seul défaut suffit à vous qualifier de méchant, alors, nous sommes tous des enfoirés. Que celui qui n'a aucun défaut jette la première pierre à Chacha (mais visez bien, sinon sa vengeance sera terrible).
Parce que nous avons TOUS une part d'ombre (oui, même toi au fond qui te croit irréprochable). Et vous savez quoi ? C'est très bien ainsi ! Sans ombre, comment exprimer la lumière ? Sans nuit, comment apprécier le jour ? Sans pluie, comment jouir du soleil ?
Adorer Loki, Morrigane, Hécate, Hel, Seth, Hermès, Odin et toute la clique, c'est accepter cette part d'ombre, et comprendre qu'elle recèle son lot de richesse et de trésors cachés, parce qu'ils sont tellement plus. C'est voir que les ténèbres décuplent la lueur de la chandelle. C'est voir que les défaut peuvent servir d'écrin aux qualités. C'est s'accepter, bons et mauvais côtés.
J'aime les défauts de Charlotte. Comme j'aime les défauts de mon barbichu, le fait qu'il oublie tout ce qu'on lui dit en 23 secondes chrono, le fait qu'il ne jette jamais ses emballages vide, le fait que ce soit juste un gros pigeon que les arnaqueurs qui font semblant de faire la manche voient venir à 42 km. Oui, ça m'exaspère, parfois, j'aimerais ne pas être obligée de lui marteler le crâne à coups de rappels mémo, et j'aimerais bien faire un gros câlin à ma Chacha. Mais tant pis. Que mon copain soit un poisson rouge et mon cochon d'Inde une peste les rend encore plus attachants.
Accepter sa part d'ombre, c'est aussi cesser de jouer un rôle et d'essayer d'être la personne que les gens voudraient que l'on soit, au détriment de celle que l'on aime être. Je ne dis pas qu'il ne faut rien faire pour s'améliorer, attention, seulement ne pas se perdre dans l'illusion de se rendre irréprochable. Garder quelques défauts qui font notre personnalité, explorer quelques voies de la Main Gauche, adopter un cochon d'Inde berserk, sont aussi des moyens d'avancer ... en dehors des sentiers battus.