Il est là, quoi.
Et puis, depuis quelques temps, l'article de Lisbeth m'a fait réfléchir à son propos, à ce qu'était devenu mon autel au fil des années, à ce qu'il était VRAIMENT. Elle y qualifie mon autel d'autel "vivant", un terme que je n'avais pas utilisé pour lui mais qui, en la lisant, fait tellement sens que je suis presque bluffée qu'elle ait pu me comprendre aussi facilement (mince, je ne croyais pas être aussi transparente) (mais QUEL EST TON SECRET ??). C'est vrai que mon autel est vivant. Il a subi tellement d'évolutions depuis ses débuts que c'est vraiment l'adjectif qui lui va le mieux. Comme moi, en fait (pour l'évolution) (parce que je savais que j'étais vivante avant l'article de Lisbeth, hein) (quoique ...). Parfois je cherche à faire le bilan sur ma pratique, un exercice tellement ardu que je m'en arrache les cheveux à la pince à épiler. Alors qu'en fait, il suffirait de regarder mon autel. Un sacré exercice de torture pour ce qu'il reste de mon pauvre vieux cerveau délabré. C'est parti pour l'auto-psychanalyse (ça va être long, allonge-toi, prends un biscuit) (10 ans de ma petite vie se trouvent résumés en diaporama dans cet article, courage).
An de gloire 2007
Il y a eu des ratés, cette année là. J'étais étudiante, donc partagée entre deux logements. Il n'y en a donc que six, Ostara (foireux, comme chaque année) et Samhain (compensé par une décoration complète de mon appart) ayant sauté.
Remarquez la splendide et tellement spirituelle plaque d'immatriculation sur la première photo. C'est d'un chic.
2008, millésime de choix
Son emplacement a changé en cours de route, passant d'une sous-pente sous mon velux à un mur droit, plus pratique pour les bougies et pour y accrocher une lune, puis un soleil en terre cuite, dénichés dans une brocante.
2009, on prend les mêmes et on recommence
Comme cela faisait déjà deux ans que j'avais pris ce pli (un sabbat = un autel) il m'était parfois difficile de trouver de nouvelles idées (étant donné que je ne voulais pas refaire chaque fois le même décor, tu comprends) (on est prise de tête ou on ne l'est pas, que veux-tu). On peut ainsi voir que certains sabbats m'inspirent plus que d'autres ! Ça aussi, c'est révélateur. Quand je vois mes autels d'Ostara ou de Litha, je les trouve bien tristounets comparés à ceux de Mabon ou de Samhain. En cela ma pratique a considérablement évolué. Pendant très longtemps Ostara a été une période de loose cosmique, un sabbat qui me m'inspirait pas plus qu'un plateau de fruits de mer périmés, et pour lequel de toute façon quelque chose foirait tout le temps. La sensation était un peu moindre pour Litha, pour lequel je n'avais pas beaucoup d'idées mais que j'aimais quand même célébrer avec ma baguette en extérieur. Mais pour ce qui était de le représenter sur mon autel euh ... C'était la cata. Aujourd'hui, c'est un de mes sabbats préférés. Comme quoi ...
2010, année merdique
Lisbeth a donc raison quand elle dit que mon autel est "vivant". Mon entrée à l'IUFM a été le début d'une lente agonie spirituelle, qui se reflète très bien dans mon autel ... Je meurs, je meurs, je meurs ... arg.
2011, le vide intersidéral
Deux autels, deux. Lamentable. Ça aurait dû m'aiguiller. J'ai pas la lumière partout, je te dis.
2012, on touche le fond
Ouais, tu peux le dire, globalement, j'ai été un peu gourde, à cette époque. On a tous nos moments de tristitude.
2013, on remonte doucement
En juillet, profitant des vacances, je remets pas mal de choses en question. Clairement, je n'ai plus ni l'énergie (avec la fatigue et mon état de santé branlant) ni le temps (merci boulot que je déteste un peu plus chaque jour) de monter un autel à chaque sabbat. En juillet, je n'en peux plus. J'enlève tout, je démonte tout, et je remets tout à plat. C'est un autel fonctionnel qu'il me faut, je n'ai plus le temps de le décorer. Je suis triste au quotidien, du coup je peine à trouver l'inspiration que j'avais auparavant pour établir de jolis décors. Mon autel m'a toujours ressemblé, or j'ai changé, bon gré mal gré (surtout mal gré, car je ne suis alors pas fan de la personne que je me sens devenir) et j'ai tenté de me mentir en gardant un autel à l'image de mon moi d'étudiante.
Mais ça ne marche plus. Je décide donc de ne garder que l'essentiel, ce dont j'ai besoin pour pratiquer, et c'est tout. Mon autel n'est pas "beau" à proprement parler, il ne porte pas les bouquets et les décorations d'autrefois mais je suis soulagée. Il est vivant et fonctionnel. Quand je passe devant, j'ai le cœur léger. Et il me redonne, doucement mais sûrement, envie de m'y arrêter pour pratiquer.
2014, on reprend du poil de la bête
Ma spiritualité s'en ressent, et mon autel reprend peu à peu son aspect fleuri, végétal et vivant. Mais je ne me mets plus de contraintes : plus de "un sabbat = un autel", c'est plutôt "un moment de grande spiritualité = un autel". Et ça marche cent fois mieux. Je revis, mon autel avec moi. D'autant que, dès juillet, il trône dans une pièce entièrement dédiée à la pratique magique. Ce qui m'a aidée considérablement, j'avoue. Avant, il était accessible, certes dans un recoin de l'appart, mais je devais enlever certains objets quand j'avais des visiteurs. Désormais, je n'ai qu'une porte à fermer ... Et ça, mon petit chat, c'est vraiment merveilleux.
2015, on adapte aux besoins réels
Fin mai, je m'aperçois que ma pratique s'exporte à l'extérieur, dans mon jardin, mon Coin et ma forêt. Du coup je ne décore plus mon autel. Je démonte tout, pour opérer un grand nettoyage, et je n'y laisse que les outils les plus indispensables à ma pratique, sans connotation "sabbatique". Il finira l'année comme ça, avec seulement de petits ajouts temporaires, comme pour Yule où la bougie centrale a cédé sa place à une création home made, et du houx a remplacé l'eau dans le calice, le temps d'un charme destiné à une copine.
Il me convient comme ça. J'y travaille beaucoup, et je retrouve ma petite routine de pratique sorcière lentement mais sûrement.
2016, le nouveau souffle
J'ai donc repris le pli de décorer mon autel à (presque) chaque sabbat. Mais sans retomber dans le piège "trop déco" de ces dernières années. En fait, au lieu de passer par les objets, les bibelots, les décors, mes parures d'autel de sabbat sont devenues au fil du temps essentiellement végétales, et bien moins prise de tête : je remplace les bougies par de nouvelles aux couleurs plus appropriées, je remplis des vases de fleurs et plantes de saison, et c'est quasiment tout. Et tu sais quoi ? Ça suffit ! Laaaargement. Je me rends compte que toutes ces années, j'en ai trop fait, c'était trop réfléchi, trop calculé. Là, je suis dans l'instinctif, le ressenti. C'est bien plus authentique et représentatif de ma pratique.
2017, une bouée de sauvetage, vite
Alors qu'il y a quelques années j'avais fait l'erreur de laisser tomber la pratique quand j'étais au plus mal, je refuse de refaire la même erreur (j'ai installé des ampoules dans ma vieille tête), et je m'y plonge avec encore plus d'ardeur et de dévotion. Et ça m'aide. Énormément. Parfois je me dis que si je n'avais pas tout ça, je tournerais chèvre.
Fin janvier, alors que la situation s'enfonce, je fais une nouvelle refonte de mon autel, cette fois pour renouer avec mes racines slaves. J'ai besoin de revenir à la source de mon paganisme, de ma pratique magique et de mes tambouilles sorcières. Les sabbats sont l'occasion de me rendre compte que, malgré toutes les saloperies que j'encaisse (ma santé, mais aussi et surtout la haine et la méchanceté de mes collègues, le harcèlement et la diffamation dont ils m'accablent (dans mon dos, naturellement, mais en s'assurant que l'écho me parvienne pour mieux me démolir, sinon c'est pas marrant, tu comprends)) la Terre continue de tourner. Imbolc, en particulier, moment où je suis au plus mal, est une lumière dans les ténèbres. Ostara et Beltane sont autant de moments où je me plonge dans la nature. Après des semaines passées enfermée, sortir est un pur bonheur, même pour quelques minutes. Je ne peux plus faire tout ce que je faisais avant, mais ça n'a aucune importance, j'avance, à mon rythme, c'est tout ce qui compte. Avoir un jardin est une aubaine, et il m'apporte énormément de bienfaits, de sérénité et de bonheur. Alors que, professionnellement, je suis malheureuse comme un menhir écroulé, je trouve dans ma spiritualité ce qu'il me manque au quotidien.
Jamais la femme et la sorcière n'ont été autant imbriquées, intimement, profondément, sincèrement, en moi. Il m'a fallu traverser le côté mochissime de la vie pour en voir la beauté dans son ampleur.
Ce n'est que le début. Le chemin sera long, caillouteux et semé d'embûches, mais peu importe. L'important, c'est de savoir que malgré tout, ce chemin est le bon. Pour preuve, mon autel ne m'a jamais paru si vivant, si puissant et si vibrant. Il en a fait, du chemin, depuis la plaque d'immatriculation et les bougies posées à même l'étagère. Et il en fera sans doute encore.
Affaire à suivre ...